A gamberger...
« Le mouton est mal placé pour juger ; aussi voit-on que le berger de moutons marche devant, et que les moutons se pressent derrière lui ; et l'on voit bien qu'ils croiraient tout perdu s'ils n'entendaient plus le berger, qui est comme leur dieu. Et j'ai entendu conter que les moutons que l'on mène à la capitale pour y être égorgés meurent de chagrin dans le voyage, s'ils ne sont pas accompagnés par leur berger ordinaire. Les choses sont ainsi par nature ; car il est vrai que le berger pense beaucoup aux moutons et au bien des moutons ; les choses ne se gâtent qu'à l'égorgement ; mais c'est chose prompte, séparée, et qui ne change point les sentiments. Les mères brebis expliquent cela aux agneaux, enseignant la discipline moutonnière, et les effrayant du loup, et encore plus les effrayant du mouton noir, s'il s'en trouve qui voudrait expliquer que le plus grand ennemi du mouton, c'est justement le berger. » (Alain, Propos)