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23 novembre 2008

Lune rouge

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Cliquez sur chaque image pour l'agrandir

Perçant les murs du village,

La tombe égorgée s'envole.

Les chauves-souris du soir affluent

Et les lanternes s'éteignent.

Perçant l'air du village, les araignées tombent

Et en récitant leurs oraisons funèbres légendaires,

Les criquets grincent terriblement...

Ravagent...les astres des ténèbres.

Les auges s'emplissent alors

De cendres, lorsque la faim expire.


Notre village est une vieille aux dents arrachées par le pain.

Sur ses seins se pavanent les hannetons, errent les charançons.

Dans ses yeux, une lanterne de ténèbres

Balancée par les saisons du limon aride.

Dans son flanc, une lame aiguisée est plantée.

Mais ni son sang ne jaillit, ni sa douleur.

Sur son crâne, un tatouage brûlant altéré.

Dans ses tresses, les soleils noirs se lèvent

Et rouillent les lunes dans leurs élégies.

Notre village fouille les fissures de l'été, à la recherche

d'un lézard vert,

De lait de corbeau et de blé de caméléon,

Et elle en vieillit. Puis s'éteint le sang prisonnier de sa matrice.

De ses cuisses file une progéniture aux yeux perdus.

Année après année, les enfants versent

Le sang primitif, dissolvent les chants légendaires

Dans l'oeil du soleil, puisent la boue dans le monde souterrain

des esprits et des rêves

Et se courbent année après année,

Sans goûter la moindre bouchée.

Les démons des ténèbres hantèrent le moulin du village.

Ils célébrèrent leurs noces dans son silence,

Dansèrent sur la rouille des auges.

Notre village, lui,  se lamentait sous le gibet des vents et la faim

Epanouissait les fleurs des chouettes et les bûches.

Les garçons frappent aux portes

Et puisent dans la lune de la famine et les étoiles muettes

Des poèmes gris

Les garçons frappent aux portes:

"Viens, par les ponts de glace,

ô soleils des cieux enneigés,

ô lune des épis, nous sommes juchés dans le noir,

Privés du goût de semoule, du vert des herbes

Et du goût de la levure expirant son acide voluptueux

Dans une matrice d'argile.

Nous sommes affamés, ô lune des épis...Pousse le moulin muet

Pour qu'il nous offre, ne serait-ce qu'une poignée de sa semoule,

mélangée au Fenugrec.

ô lune des épis et des mythes,

Eclate sur le pont de la famine...en tranches de pain "

A travers les murs du village,

Les branches du soleil primitif murmurent :

"Les auges éclatent en rire dans les moulins.

Sur tes seins, deux nerpruns

Rient dans le sang de l'enfer à la voix grave.

Leurs voix rient pour le soleil.

Elles ouvrent leur porte nocturne entre le sang et l''accouchement pénible".

Lune rouge. Poème de Mohamed Afifi Matar, in Le poème arabe moderne, Maisonneuve & Larose, pages 247-248.

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Commentaires
P
...la lune est jaune et les hannetons se pavanent sur le derrière des bovins!
M
Un peu comme Dija je pense que ces photos ne descendent pas aussi profond dans la noirceur que ce texte "cendres-oraison funèbre-douleur-sang-boue-lamentations-enfer". <br /> Peut-être ce bleu riant à peine entâché de rouge a-t-il pour but de l'adoucir?
P
La densité de ces couleurs me touche, l'intensité du bleu, un peu Majorelle, couleur matiére chau et le rouge rouille. Vibrations lumineuses denses.<br /> B.
F
y'a que sur ton blog que je trouve des couleurs aussi profondes ! pour le plaisir des yeux et du cerveau. Mais tu sais, le bleu, en france... Tu m'as compris ;)
D
j'adore le bleu mais je me demande s'il peut nuancer la tristesse que dégage ce paysage textuel. <br /> une lune qui saigne comme le texte, ce dernier peut bien traduire la misère dans les images précédentes
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