Jolie, coiffée, parée comme s'il pouvait la voir...

Sous Notre-Dame-de-la-Garde, la ville s'étale dans la lumière. Le port scintille. Au large, des bateaux font le berger pour les moutons de la mer.

Jolie, coiffée, parée comme s'il pouvait la voir, elle est à ses côtés. Tous deux sont immobiles, graves, descendus en eux-mêmes.

De son bras parfumé, de ses doigts soignés, de ses ongles laqués, elle montre ce qu'il ne peut voir. Ce que jamais il ne pourra voir.

Ses gestes sont pour lui. Belle pour lui, elle lui parle dans l'éclair de sa bouche attirante.

Elle décrit la ville, le port. D'une voix basse, intime, particulière. Une voix d'amoureuse. Elle parle de la mer. Elle le tourne pour  que son visage sente la lumière.

Il ne peut la voir. Il ne la verra jamais.

L'aveugle et la jeune femme, poème de Gabriel Cousin, revue Action Poétique.

Musique de Lisa Germano

Titre : The darkest night of all

Comments

[estel]

Troublante photo,elle me touche beaucoup.La lumière est parfaite.

[michelgonnet]

Quelle "virée"! Superbe.

Bonne soirée.

[CoRiNNe]

je ferme les yeux et j'écoute...

[Fugitive]

... c'est une bouteille que l'on promène le long d'un chemin... D'accord, je dévie un peu la pensée de Stendhal... mais c'est un peu cela quand même ici. Et c'est tout aussi magique, étonnant, troublant.

[Kenza]

chapeau pour le choix de musique, je m'y croyais presque

Gamine je me souviens d'avoir lus ''al ayam'' (les jours) de Taha Houssein et son rapport à la lumière et aux sentiments qu'elle évoque chez l'aveugle qu'il était m'avait fasciné... comme s'il pouvais la voir aussi...